IVDR : considérations essentielles pour valider une analyse de cytométrie en flux conformément aux exigences de la norme ISO 15189
Brice Ezzouaouy, Global Product Manager | Beckman Coulter Life Sciences, Marseille (France)
CE LIVRE BLANC VOUS PERMETTRA DE:
- Comprendre l'importance de la norme ISO 15189 pour les tests de cytométrie en flux développés en laboratoire, notamment dans le contexte du nouveau règlement 2017/746 IVDR de l'UE
- En savoir plus sur les principales performances d'analyse à vérifier ou à valider pour répondre aux exigences de la norme ISO 15189
- Découvrir des conseils techniques et des méthodologies concrètes pour répondre aux exigences de la norme ISO 15189s
Introduction
La norme ISO 15189:2012 « Laboratoires de biologie médicale – Exigences concernant la qualité et la compétence » (ISO 15189) spécifie les exigences relatives à la qualité et à la compétence des laboratoires de biologie médicale. Comme d'autres normes ISO, qui visent à normaliser les pratiques au niveau mondial, la norme ISO 15189 s'efforce d'harmoniser les exigences en matière de système de management de la qualité (SMQ) pour les laboratoires de biologie médicale effectuant des diagnostics in vitro.
Si l'accréditation ISO 15189 n'est obligatoire aujourd'hui que dans certains pays du monde, avec le règlement européen IVDR 2017/746 (IVDR) à venir, l'accréditation va devenir une exigence pour tous les laboratoires cliniques de l'Union européenne qui effectuent des tests développés en laboratoire (TDL). Les TDL sont particulièrement importants pour des disciplines telles que la cytométrie en flux, car il n'existe pas de solutions de diagnostic in vitro prêtes à l'emploi disponibles dans le commerce pour toutes les applications de diagnostic, notamment dans le domaine de l'hématooncologie.
L'accréditation d'un TDL de cytométrie en flux conformément à la norme ISO 15189 est loin d'être simple et nécessite une planification minutieuse. Parmi les nombreuses exigences couvertes par la norme ISO 15189, la validation des performances d'analyse peut être particulièrement difficile, car la norme ne propose pas de procédure standard et ne fournit pas beaucoup de détails sur les expériences à réaliser. Ce livre blanc aborde certaines des principales caractéristiques de performances d'analyse nécessitant une validation conformément à la norme ISO 15189, les défis
associés spécifiques aux laboratoires de cytométrie en flux, et certaines considérations essentielles pour un parcours réussi vers l'accréditation ISO 15189.
ISO 15189 : aperçu et objectifs
La norme ISO 15189, qui s'appuie sur les normes ISO 17025 et ISO 9001, est la seule norme mondiale pour l'accréditation des laboratoires de biologie médicale fournissant des exigences liées à leurs compétences et à leurs systèmes de qualité. L'approche d'une norme mondiale visant à harmoniser et à standardiser la qualité et les compétences des laboratoires
de biologie médicale dans tous les pays est incontestablement précieuse. On estime que la médecine de laboratoire joue un rôle dans 70 % des décisions cliniques. Rien qu'au Royaume-Uni, chaque citoyen subit en moyenne 14 tests1 par an effectués par un spécialiste en médecine de laboratoire. Il est donc essentiel que les tests de diagnostic in vitro soient réalisés dans des conditions contrôlées.
La norme ISO 15189 est exhaustive ; elle couvre l'ensemble du SMQ du laboratoire. Elle se compose de plus de 170 articles, sans compter les annexes. Elle encourage la pleine participation et l'utilisation des capacités de tous les employés, à tous les niveaux, pour améliorer l'organisation. Son objectif est de s'assurer que les membres du personnel savent exactement ce qu'ils doivent faire, comment le faire, qui est responsable d'un processus et où trouver toutes les informations nécessaires à l'exécution de leur travail.
La norme est principalement divisée en une partie concernant la gestion (partie 4) et une partie sur les exigences techniques (partie 5).
Tableau 1 : Contenu des parties 4 et 52 de l'ISO 151892
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Bien que publiée il y a presque 20 ans (en 2003), la norme ISO 15189 a été révisée en 2007 pour être alignée plus étroitement avec la norme ISO/IEC 1702533, puis une nouvelle fois en 2012. Même si son objectif était la transition d'exigences spécifiques à chaque pays à une norme reconnue au niveau international, elle n'a pas encore été largement adoptée au niveau mondial. Si elle a été adoptée par un plus grand nombre de pays, elle n'est cependant toujours pas obligatoire dans plusieurs grands pays européens ou aux États-Unis en 2020.
L'une des raisons de sa faible adoption dans le monde entier tient à la complexité de sa mise en oeuvre. La norme ISO 15189 est coûteuse, exige du temps et des ressources, et ne représente pas un effort ponctuel mais constant, car son principe repose sur l'amélioration continue. Les petits laboratoires n'ont généralement pas la capacité de mettre en oeuvre un SMQ aussi complet. La France illustre parfaitement ce point : elle a été l'un des premiers pays à rendre la norme ISO 15189 obligatoire (à partir de 2011). Le paysage des laboratoires cliniques y a été complètement transformé
en l'espace de dix ans, le nombre de laboratoires étant passé de 5 000 en 2008 à moins de 900 dix ans plus tard. Cette restructuration a été largement attribuée à la nécessité pour les petits laboratoires de se regrouper afin de satisfaire aux exigences d'accréditation4.
Le coût moyen du processus d'accréditation d'un laboratoire a été estimé à 445 000 euros dans la phase initiale, puis à 145 000 euros annuels pour son maintien par la suite5.
Autre défi posé aux laboratoires suivant la norme ISO 15189 : celle-ci ne précise pas quelles expériences et quels protocoles détaillés doivent être menés pour répondre aux exigences techniques. Avec cette place laissée à l'interprétation, il peut être difficile de traduire une exigence de haut niveau en un plan d'action concret.
ISO 15189 : pierre angulaire des TDL conformes au règlement IVDR
Le nouveau règlement de l'UE relatif aux dispositifs médicaux de diagnostic in vitro 2017/746 (IVDR) est entré en vigueur le 26 mai 2017, avec une période de transition prévue de 5 ans. Le règlement IVDR remplace la directive européenne (98/79/CE), qui réglementait les dispositifs médicaux de diagnostic in vitro (DIV ou IVD en anglais) depuis 1993. Des difficultés sont apparues dans l'interprétation et l'application de cette directive, notamment en raison des faibles niveaux de contrôle prévus pour les dispositifs DIV potentiellement « à haut risque ».
Le règlement IVDR est une révolution pour les fabricants de dispositifs médicaux de diagnostic in vitro. Alors qu'avec la directive européenne (98/79/CE), la plupart des produits CE-IVD sont auto-certifiés, avec le règlement IVDR, jusqu'à 90 % du secteur a désormais besoin d'un organisme notifié, et les fabricants doivent se conformer à des exigences supplémentaires (et importantes) liées à leur système de management de la qualité (SMQ) couvrant tous les domaines applicables, de la validation des performances d'analyse à la surveillance proactive après la mise sur le marché.
Le règlement IVDR n'a pas seulement un impact sur les fabricants de dispositifs de diagnostic in vitro, mais sur l'ensemble de l'écosystème du diagnostic clinique, y compris les utilisateurs finaux. Cela est particulièrement vrai pour les laboratoires cliniques qui s'appuient sur des tests développés en laboratoire (TDL). Si l'IVDR reconnaît la nécessité des TDL pour
diagnostiquer des pathologies spécifiques, il prend également en compte le risque associé aux TDL mal contrôlés et à haut risque. Comme la barre est placée plus haut pour les fabricants, il est logique que les tests de diagnostic in vitro développés et fabriqués dans les laboratoires soient également contrôlés de manière appropriée.
Pour effectuer des TDL, les laboratoires cliniques doivent désormais répondre à une nouvelle série d'exigences, décrites principalement dans l'article 5.5 du règlement IVDR. Les laboratoires qui effectuent des TDL mais ne satisfont pas aux exigences de l'article 5.5 seront considérés comme équivalents aux fabricants de DIV, ce qui signifie que le laboratoire doit se conformer à l'ensemble du règlement (par exemple, démontrer des preuves cliniques, contacter un organisme notifié et établir des processus de surveillance après la mise sur le marché). S'il est déjà difficile pour les fabricants de DIV de se conformer à ces exigences, en dépit du fait qu'ils disposent de grandes équipes interfonctionnelles pour soutenir le développement et la commercialisation d'analyses pour les laboratoires de l'UE, il reste à voir combien de laboratoires auront la capacité de réaliser des TDL sans satisfaire aux exigences de l'article 5.5.
Une exigence clé de l'article 5.5 est que les laboratoires doivent se conformer à la norme EN ISO 15189 ou, le cas échéant, aux réglementations nationales, y compris les règles nationales d'accréditation.
La figure ci-dessous résume le flux de travail typique d'un laboratoire clinique validant un essai TDL par rapport à un essai CE-IVD, dans le contexte de l'IVDR par rapport à l'IVDD. Pour la cytométrie en flux, les panels construits à l'aide d'anticorps conjugués individuels marqués CE pourraient grandement améliorer le flux de travail de validation, car il se peut que l'essai ne soit pas considéré comme un TDL, et que le laboratoire n'ait donc pas à répondre aux exigences de l'article 5.5. La conformité à la norme ISO 15189, ou à d'autres règles d'accréditation nationales le cas échéant, est une pierre angulaire du processus de validation de l'IVDR, en particulier pour la validation des performances des TDL.
Figure 1 : validation DIV et TDL dans le contexte d'IVDD et IVDR
Consultez l'infographie IVDD vs IVDR.
Validation des performances de TDL selon la norme ISO 15189 : considérations clés
Les exigences techniques visant à garantir que les tests de DIV présentent des performances adéquates sont un élément clé de la norme ISO 15189. La validation des méthodes est potentiellement la partie la plus difficile et la plus longue du parcours ISO 15189. Les exigences techniques figurent dans la partie 5.3 Matériel de laboratoire, réactifs et consommables et 5.5 Processus analytiques présentés dans le tableau 1 ci-dessus.
La norme ISO 15189 fournit des lignes directrices générales permettant d'adapter la méthode d'accréditation en fonction des spécificités locales. Cela ne facilite pas la tâche des laboratoires de biologie médicale qui doivent déterminer les procédures et les expériences à réaliser pour répondre aux exigences. Certaines institutions nationales ont créé des guides techniques plus concrets pour soutenir leurs laboratoires dans cette démarche. C'est le cas, par exemple, en France, où le COFRAC (organisme national d'accréditation français) a publié des recommandations techniques dans un guide de méthodologie6. Une partie importante du contenu qui suit dans ce livre blanc s'appuie sur les recommandations du COFRAC. Ce document n'est certainement pas un guide exhaustif, et une autre méthodologie pourrait certainement être acceptable, pour autant qu'elle soit justifiée et documentée.
Aperçu du processus de validation des méthodes
L'IVDR est un parcours qui nécessite une planifi cation minutieuse en amont, en particulier la validation de la méthode. La fi gure ci-dessous met en évidence les étapes clés pour vérifi er ou valider une méthode.
Figure 2 : principales étapes de vérifi cation ou de validation d'une méthode
Si le laboratoire clinique met en oeuvre une méthode qui a déjà été validée (par exemple, des tests marqués CE-IVD utilisés conformément aux instructions du fabricant dans le cadre de l'utilisation prévue), le laboratoire devra uniquement vérifier que les caractéristiques de performance revendiquées par le fabricant sont respectées dans cet environnement. Si le laboratoire clinique met en oeuvre une méthode développée en interne, ou modifi e une méthode validée pour mieux répondre à ses besoins, il devra valider les caractéristiques de performance. Les tableaux ci-dessous donnent un exemple des paramètres qui doivent être évalués, dans le contexte d'une vérifi cation ou d'une validation, pour une méthode quantitative et qualitative.
Tableau 2 : Paramètres à vérifier et/ou à connaître pour une méthode quantitative et une méthode qualitative6
Méthode quantitative
Méthode qualitative
Sur la base des résultats, le laboratoire doit déterminer la pertinence de la méthode. Si les spécifications définies ne sont pas respectées, le laboratoire doit justifier leur acceptation.
Répétabilité et exactitude
La répétabilité et l'exactitude d'un système sont deux paramètres clés à valider. Ils ne sont pas liés mutuellement. Un test de DIV peut être exact mais non répétable, ou inversement. Il peut avoir une répétabilité élevée tout en manquant fréquemment la cible, comme l'illustre la figure 3.
Figure 3 : répétabilité comparée à l'exactitude
On évalue la répétabilité en analysant le même échantillon plusieurs fois – avec le même opérateur, le même lot de réactifs et le même instrument – dans un court laps de temps. Dans la mesure du possible, il est préférable d'utiliser 2 niveaux de concentration, avec un niveau proche du seuil de décision ; 30 tests sont généralement idéaux pour garantir la pertinence statistique. Le nombre de tests peut varier en fonction d'éventuelles limites : disponibilité des échantillons, coût des réactifs, durée de l'expérience, etc. Le coeffi cient de variation est calculé à partir de la moyenne et de l'écarttype (= écart-type / moyenne × 100) et doit être inférieur à l'objectif de répétabilité défi ni au préalable. La répétabilité doit être évaluée pour chaque type d'échantillon (par exemple, sang total, moelle osseuse). Il peut être nécessaire d'évaluer à nouveau la répétabilité après une intervention importante sur le système, comme la maintenance.
L'évaluation de l'exactitude implique généralement une comparaison avec une valeur cible, en s'appuyant sur des contrôles de qualité externes et/ou des programmes de tests de l'effi cacité. La valeur cible est la valeur moyenne de tous les participants pour un paramètre normalisé (par exemple, la valeur de consensus), ou la valeur moyenne des participants utilisant la même méthode. Le pourcentage de biais sera calculé pour le test en cours de validation comme suit :
% de biais = (moyenne des tests de reproductibilité intralaboratoire − valeur cible) / valeur cible × 100.
La norme ISO 5725 Exactitude (justesse et fi délité) des résultats et méthodes de mesure fournit plus d'informations dans sa partie 4 : Méthodes de base pour la détermination de la justesse d'une méthode de mesure normalisée.7
Précision intermédiaire (reproductibilité intralaboratoire)
Pour évaluer la répétabilité, tous les paramètres restent les mêmes. Pour calculer la précision intermédiaire (également appelée reproductibilité intralaboratoire), le même échantillon est analysé plusieurs fois dans des conditions variables telles que : opérateur, heure, lots de réactifs et instrument. Un protocole typique comprend 30 tests sur 15 jours avec 2 niveaux. D'autres approches sont acceptables tant qu'elles peuvent être justifi ées d'un point de vue statistique. Là encore, le coeffi cient de variation est calculé sur la base de la moyenne et de l'écart-type, et doit être inférieur à l'objectif défi ni au préalable.
Linéarité, limite de détection et quantification
La limite de détection est le plus petit signal qui puisse être distingué du bruit de fond. Elle peut être définie en réalisant 30 mesures sur un contrôle négatif, définissant la limite de détection comme 3 fois l'écart-type. Pour une méthode qualitative, la limite de détection sera le seuil positif.
La limite de quantification est la plus petite valeur mesurée avec un niveau de confiance acceptable. Elle peut être égale à 10 fois l'écart-type de 30 mesures de contrôles négatifs. Elle peut aussi être évaluée par la dilution d'un contrôle comme suit :
- Effectuez 11 dilutions d'un contrôle (par exemple, 100 + 0, 90 + 10 … 10 + 90 ; 0 + 100).
- Effectuez chaque dilution 10 fois et évaluez le coefficient de variation.
- La limite de quantification sera définie comme la plus petite concentration conduisant à un CV`< 10 %.
Une autre approche de la dilution pourrait consister à évaluer différents mélanges de lignées cellulaires positives et négatives.
La linéarité entre les dilutions et les concentrations mesurées doit être vérifiée. La limite supérieure de linéarité et la limite de quantification doivent couvrir la gamme de concentration des échantillons que l'on s'attend à tester en laboratoire.
Incertitude et facteurs de variabilité
Dans tout test de DIV, il est essentiel de définir les facteurs qui peuvent influencer le résultat et ceux qui sont non significatifs (à justifier), et de démontrer que les autres facteurs sont contrôlés. L'incertitude de mesure est définie dans la norme ISO 15189 partie 3.17 comme « un paramètre associé au résultat d'un mesurande qui caractérise la dispersion des valeurs. »
Il n'y a pas une mais plusieurs approches pour évaluer l'incertitude de mesure. Par exemple, elle peut être définie en s'appuyant sur les résultats des contrôles de qualité internes et externes, en exprimant les résultats comme valeur ± U, où U est l'incertitude calculée avec la formule suivante : U = √ ((A2 + B2))
Où :
A = variance (SD2) de tous les CQ internes
B = (moyenne de l'étude de reproductibilité − valeur cible × 100) / valeur cible
Figure 4 : illustration des résultats d'un patient à deux moments différents, les barres d'erreur illustrant l'incertitude des résultats. Ici, il n'a pas été possible de conclure que les résultats sont différents, car cela pourrait être inhérent à l'imprécision de la mesure.

Stabilité des réactifs
La définition de la stabilité des réactifs n'est pertinente que dans le contexte de la validation d'une méthode, car le laboratoire peut autrement se fier aux données fournies par le fabricant, tant qu'il respecte les instructions d'utilisation du réactif, ainsi que l'usage prévu et les conditions de stockage pour les flacons fermés et ouverts. La stabilité d'un réactif doit être démontrée pour le flacon fermé (durée de conservation du réactif) et le flacon ouvert. Ceci est particulièrement vrai pour les anticorps conjugués utilisés en cytométrie de flux, car plusieurs facteurs peuvent affecter les performances du produit lorsque le flacon est ouvert et en cours d'utilisation (par exemple, l'oxydation, la dégradation par la lumière)8.
Une approche classique pour tester la stabilité des réactifs consiste à tester un échantillon de valeur connue (par exemple, un contrôle) du jour 1 au jour n, avec un minimum de 10 réplicats entre le jour 1 et le jour n. La variabilité acceptable du paramètre mesuré est définie au départ (par exemple, ±10 %). La limite de stabilité est définie comme la dernière valeur dans la plage de variabilité acceptée.
Figure 5 : illustration des résultats d'une évaluation de la stabilité d'un réactif sur 60 jours. Dans cet exemple, la stabilité du réactif est de 50 jours, car au-delà de ce délai, les résultats sortent de la variabilité acceptable (±10 % dans cet exemple).
Comparaison des méthodes
La comparaison des méthodes est effectuée après la vérification d'autres critères (par exemple, la répétabilité, la reproductibilité intralaboratoire, l'exactitude, la linéarité) en analysant au moins 30 échantillons couvrant la gamme de concentrations que le laboratoire s'attend à analyser, à la fois au moyen d'une méthode à valider et au moyen d'une méthode de référence, et ce, dans un court laps de temps. On analyse alors les discordances pour s'assurer qu'elles se situent dans des limites préétablies. Si certains échantillons échouent, la ou les causes potentielles doivent être identifiées (par exemple, anticoagulant, âge de l'échantillon) et une ou plusieurs contre-mesures doivent être mises en place, si nécessaire.
Figure 6 : illustration d'un graphique de comparaison indiquant la concordance entre une nouvelle méthode et la méthode de référence par rapport à laquelle elle est validée

Contamination entre les échantillons
La contamination entre les échantillons s'applique principalement aux systèmes automatisés et aux paramètres sensibles (par exemple, la bêta-HCG). Il est particulièrement important d'évaluer les systèmes automatisés de préparation des échantillons et les systèmes de lavage et/ou de décontamination.
Un protocole d'évaluation de la contamination entre les échantillons peut consister à analyser 3 fois un échantillon à forte concentration (H1, H2, H3, mH moyen), puis 3 fois un échantillon à faible concentration (B1, B2, B3). La séquence est répétée 5 fois, et la moyenne de B1 et B3 est calculée. Grâce à un test t de Student, le laboratoire peut définir si mB1 est différent de mB3. Le pourcentage de contamination peut être calculé comme suit : (mB1 − mB3) / (mH − mB3) × 100.
La contamination entre réactifs peut également être évaluée lorsque le même système de distribution est utilisé pour tous les réactifs. Ici, le paramètre A est mesuré 10 fois sur le même échantillon. Ensuite, le paramètre A est mesuré à nouveau 10 fois, mais en alternance avec le paramètre B. Un test t détermine alors si la différence entre les deux moyennes est statistiquement différente pour le paramètre A.
VDossier de vérification/validation et suivi continu des performances
La collecte de données, aussi importante soit-elle, s'avère inutile si les données ne sont pas exploitées et résumées de manière appropriée. Dans le cadre de l'accréditation ISO 15189, le laboratoire créera un dossier par test. Chaque dossier comprendra, entre autres, les éléments suivants :
- Description du processus analytique (étapes, méthodes, éléments à vérifier/valider)
- Gestion des risques
- Détermination des critères de performances à évaluer
- Détermination des spécifications ou des limites acceptables pour ces critères
- Vérification de la bibliographie
- Plan expérimental et méthodologie de mise en oeuvre
- Compilation et analyse statistique des données recueillies
- Conclusion et décision concernant la validité du test selon les critères de performances définis
Des institutions nationales telles que le COFRAC en France fournissent un modèle pour ces dossiers9.
La pierre angulaire de la norme ISO 15189 est l'amélioration continue. La validation des performances n'est pas un effort ponctuel. L'exploitation des données statistiques issues des contrôles de qualité internes et externes permettra aux laboratoires de vérifier et de confirmer la validité des performances suivantes dans le temps :
- La reproductibilité intralaboratoire doit être vérifiée périodiquement, en particulier à proximité des valeurs limites, et doit être réévaluée pour chaque nouveau lot de réactifs
- Précision (à l'aide du matériel de référence)
- Vérification (et adaptation éventuelle) des valeurs de référence pour la population du laboratoire
Conclusion
La liste des paramètres à valider et les méthodologies associées énumérées dans ce livre blanc ne sont que des exemples et ne sont pas destinés à constituer une liste exhaustive. Chaque laboratoire doit définir quels paramètres doivent être validés dans le contexte de ses expériences de DIV et des normes auxquelles il doit se conformer, et il doit définir un protocole optimal pour atteindre ses objectifs.
La norme ISO 15189 ne précise pas comment aborder une exigence ou une clause particulière, mais encourage un SMQ efficace intégré à toutes les parties de l'opération, avec un objectif d'amélioration continue.
Bien que les exigences de la norme ISO 15189 soient les mêmes pour toutes les techniques de DIV, la cytométrie en flux est certainement l'une des plus difficiles à accréditer, en particulier les TDL de cytométrie en flux10. Des règles d'accréditation ont été établies pour les systèmes de test hautement standardisés. Contrairement à d'autres disciplines, telles que l'hématologie ou la chimie clinique, qui sont hautement standardisées et basées sur des tests automatisés et prêts à l'emploi, disponibles dans le commerce, les panels multicolores de cytométrie en flux présentent des couches supplémentaires de complexité (par exemple, le développement du test, la préparation manuelle des échantillons, le traitement/l'analyse complexe des données).
En outre, le diagnostic et le suivi des hémopathies malignes sont complexes et dynamiques. Les protocoles de test sont constamment révisés en fonction des dernières opinions/données, notamment lors de l'introduction de nouveaux marqueurs, colorants, instruments et logiciels permettant l'analyse d'un plus grand nombre de paramètres. L'accréditation de ces méthodes par le biais de la norme ISO 15189 exige des efforts considérables et une planification minutieuse en amont ; l'ajout de nouvelles exigences IVDR, telles que celles énoncées à l'annexe I, pourrait limiter l'utilisation des TDL en Europe aux seules applications où cela est obligatoire en l'absence d'alternative.
La norme ISO 15189 et le système IVDR placent la barre plus haut pour les TDL. Par conséquent, les laboratoires cliniques n'utiliseront probablement les TDL que lorsqu'il n'existe pas d'autres solutions, et se tourneront vers les tests de DIV disponibles dans le commerce, ou utiliseront des composants déjà marqués CE-IVD pour leurs TDL, conformément aux instructions d'utilisation du fabricant.
Avec le règlement IVDR, les exigences de qualité et de validation vont augmenter de manière significative pour les fabricants. Il semble logique que les mêmes tests de DIV développés dans les laboratoires fassent l'objet de contrôles plus stricts. Cette tendance à un plus grand contrôle des TDL s'étend au-delà de l'Europe. Aux États-Unis, par exemple, la Food and Drug Administration envisage également de réglementer les TDL.11 La FDA a déjà indiqué qu'elle trouvait problématique qu'un test développé par un fabricant de DIV soit réglementé différemment d'un test identique développé en laboratoire.12
Références
- The NHS, National Pathology Program, https://www.england.nhs.uk/wp-content/uploads/2014/02/pathol-dig-first.pdf
- International Organization for Standardization (ISO) 15189. Schneider et al. Ann Lab Med. 2017 Sep
- ISO 15189:2012 Medical laboratories - Requirements for quality and competence. Westgard QC. Pereira, P. (February 2017).
- Medical biology in the face of the evolution of health care needs. Académie Nationale de Pharmacie. 2018
- Laboratoires de biologie médicale : analyse des coûts liés à l’accréditation selon la norme EN ISO 15189. Syndicat National des Médecins Biologistes. Mai 2011. http://www.bioprat.com/modules/upload/upload/coutsaccreditation.pdf
- SH-GTA 04 technical guide, https://tools.cofrac.fr/documentation/SH-GTA-04
- ISO 5725-4:1994. Accuracy (trueness and precision) of measurement methods and results -- Part 4, https://www.iso.org/fr/standard/11836.html
- Flow cytometry and the stability of phycoerythrin-tandem dye conjugates. R. Hulspas et al. Cytometry Part A. 2009
- SH FORM 43, COFRAC. https://tools.cofrac.fr/fr/documentation/index.php?fol_id=64
- Accreditation of Flow Cytometry in Europe. Sack et al. Cytometry Part B (Clinical Cytometry) 84B:135–142 (2013)
- FDA Notification and Medical Device Reporting for Laboratory Developed Tests (LDTs), Draft Guidance Document, US FDA, 2014 https://www.fda.gov/regulatory-information/search-fda-guidance-documents/fda-notification-and-medical-device-reporting-laboratory-developed-tests-ldts
- Discussion Paper on Laboratory Developed Tests (LDTs), US FDA, 2017 https://www.fda.gov/media/102367/download


